L’avion est le moyen de transport le plus émetteur de gaz à effet de serre. Mais est-il vraiment possible de faire autrement ? Peut-on continuer à voyager ou à assurer ses déplacements professionnels uniquement avec le train ? Découvrez les témoignages de ces professionnels qui ont choisi leur camp et dit non à l’avion.
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Vers l’interdiction des vols intérieurs courts? Le 1er décembre 2022, la Commission européenne a validé une décision qui implique la suppression des vols intérieurs en France, lorsqu’une liaison ferroviaire directe de moins de 2h30 est possible.1
Un premier pas significatif (même si la Convention Citoyenne pour le Climat avait demandé la suppression en cas d'alternative de moins de 4h, ce qui était plus ambitieux).
Les vols domestiques en France émettent en effet un peu plus de 5 millions de tonnes de CO2 par an.2 Pour vous donner des chiffres à l’échelle individuelle, un seul trajet Paris-New York émet environ 1,75 tonne de CO2 soit presque la totalité des émissions de gaz à effet de serre auxquelles un Français doit se limiter (2 tonnes), si on veut respecter l’Accord de Paris et limiter le réchauffement climatique sous la barre des 1,5°C à l’horizon 2100.
Mais est-il vraiment possible de se passer définitivement de l’avion ? Pour les vacances déjà, mais pour les rendez-vous professionnels qui doivent se caler dans un planning contraint ?
Certains relèvent le défi. C’est le cas de Romain, Barthélémy, Charlotte* et tant d’autres… Que ce soit pour des allers-retours mensuels entre Paris et Barcelone ou pour un voyage en Laponie, ils ont délaissé l’avion au profit des moyens de transports ferroviaires. Même si ce n’est pas toujours facile…
Ils nous racontent les raisons de leur choix, l’organisation de leurs voyages et la perception de leur entourage.
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Découvrir l’Europe en train et en autobus
Aviophobie mise à part (phobie de prendre l’avion), l’idée de renoncer à la voie des airs pour voyager s’appuie souvent sur une prise de conscience écologique. Le calcul de son empreinte carbone est souvent un bon déclencheur. On peut constater en un clin d'œil l’impact de l’avion sur son bilan annuel (2 ou 3 vols suffisent à produire plusieurs tonnes de CO2). Si on est alors dans une démarche de réduction de son empreinte, arrêter l’avion est clairement un levier très efficace. Mais cela veut aussi dire renoncer au confort et à la rapidité. Car opter pour le train, c’est presque toujours allonger son temps de voyage, et donc réorganiser un peu ses vacances ou son déplacement professionnel.
Mais, à la clé… la satisfaction d’avoir utilisé un moyen de transport beaucoup moins énergivore : le train est en effet 18 à 30 fois moins impactant qu’un trajet en avion. Voilà qui motive !
Et c’est bien pour cette raison que Barthélémy, étudiant en journalisme, a opté pour le slow travel afin de rendre visite à son frère qui vit en Finlande. Plutôt que de prendre l’avion, il a décidé d’y aller en train, en autocar et en bateau. Au total, il a fallu 3 jours au jeune homme de 23 ans pour rejoindre sa destination.
“Je n’avais pas envie de prendre l’avion et d’émettre beaucoup de CO2 pour rien. L’an dernier, j’ai pas mal pris l'avion car j’étais moins conscient des enjeux climatiques, j’ai eu envie de faire des efforts. En plus, au moment de ce voyage, j’avais du temps devant moi, donc pourquoi se presser de rejoindre la Finlande en 3h si j’avais 3 jours ?
Une décision qu’il ne regrette pas. Comme le dit l’Eurostar dans ses affiches promotionnelles : “On voit plus (de paysage) quand on ne vole pas”. Un slogan éprouvé par Barthélémy qui a pu profiter des paysages pendant toute sa traversée d’Europe du Nord. Et même s’octroyer une escale au Danemark : “Entre deux bus, j’ai pu visiter Copenhague et c’était génial. Je n’aurais jamais pu faire ça si j’avais voyagé en avion.” En revanche, côté confort et fatigue, il est sûr que le train a ses limites… Heureusement nous confie Barthélémy “J’ai pu me reposer sur le bateau entre la Suède et la Finlande. J'étais content de retrouver un vrai lit !”.
Déplacement professionnel en train : c’est plus long mais aussi plus productif !
A 43 ans, Romain travaille dans le domaine du conseil. Durant plusieurs années, il a dû faire des allers-retours réguliers entre Paris et Barcelone. Un crève-cœur pour lui qui faisait très attention à réduire son empreinte carbone. Très vite, il a donc décidé de prendre le train plutôt que l’avion.
Une décision qui a eu du mal à passer du côté de son employeur. “On m’a gentiment demandé de ne pas faire trop de publicité autour de moi. (...) C'est frustrant parce qu’on a l'impression de faire un effort pour le bien commun, de faire un vrai pas en avant dans son engagement écologique… et on finit par le cacher, ou presque, comme si c’était quelque chose de répréhensible.”
Pourtant, il y a un décalage entre les idées reçues de sa direction et la réalité. “En train, on met 6 h 30 entre Paris et Barcelone. En avion, il faut être à l’aéroport deux heures avant le décollage. Habitant en région parisienne, je mets une bonne heure pour m’y rendre. Viennent ensuite 2h d’avion et le taxi en arrivant. Finalement, mis bout à bout, l'avion, c'est certes plus court, mais d'1h ou 2h seulement.” explique-t-il.
Et l’argument le plus important était qu’il pouvait travailler plus facilement dans le train. Car dans l’avion, l’espace et le temps sont réduits si l’on comprend le décollage et l’atterrissage.
“Alors qu'en étant avec le Wi-Fi dans le train pendant 6h30, je travaillais pas mal. On est assez concentré. Et même si je recevais des appels, je pouvais toujours me mettre sur une plateforme quand le réseau passait bien. Il m’arrivait de passer 1h au téléphone entre deux wagons. Bon, ce n’est pas optimal mais cette méthode fonctionnait.” ajoute-t-il.
Impact carbone limité mais galères maximisées ?
Grèves, incidents voyageurs, problème sur les voies,... tous les voyageurs réguliers de la SNCF le savent. Les voyages en train ne se passent pas toujours comme prévu (comme ceux en avion, cela dit !).
Charlotte*, responsable en communication et RSE, en a fait l’expérience Elle qui avait décidé de prendre les rails plutôt que la voie des airs pour relier Paris et Madrid, en a été pour ses frais. Son déplacement professionnel a tourné au vinaigre.
“En début d’année, j’ai eu un déplacement à l’international pour le travail et on m’avait donné le feu vert pour y aller en train. Les prix étaient les mêmes que pour un avion. J’ai passé des semaines à organiser le voyage car il n’y avait pas de trajet direct proposé par la plateforme de réservation interne de mon entreprise.
Il a fallu chercher sur d’autres sites pour trouver un voyage avec un seul changement. J’avais payé un AirbnB pour limiter le surcoût et je sacrifiais deux nuits loin de mes proches. Mais j’étais motivée ! Je voulais aussi me prouver qu’on pouvait voyager autrement. Finalement, quelques jours avant, mon train aller a été annulé. Trop tard pour en trouver un autre qui me permette de suivre le planning prévu. J’ai finalement dû prendre l’avion et j’ai perdu ma nuit d’hébergement. Énorme déception !”
Un coup dur pour celle qui était convaincue que cela pouvait fonctionner malgré les réactions étonnées : “Quand vous annoncez vouloir y aller en train, on vous regarde interloqué, on se demande combien de temps ça va prendre. Par le passé, j’avais déjà expliqué vouloir prendre un train de nuit plutôt qu’un avion, j’ai bien vu les rires et regards en coin.”
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Finalement, est-ce que ça vaut la peine de prendre le train ?
Malgré son expérience malheureuse, Charlotte* conclut en nous disant qu’il faut se lancer dans l’aventure ferroviaire et assumer ce choix. Pour Barthélémy, un voyage en Asie par voie uniquement terrestre se prépare en vue de réaliser un documentaire.
Il ajoute : “La clé pour voyager autrement, c’est le temps ! Pas facile quand on a seulement une semaine de congés par ci par là. Mais si on arrive à prendre ce temps-là, le slow travel en vaut vraiment le coup.”
Vous avez vous aussi décidé de renoncer à l’avion pour des raisons écologiques ou économiques ? Dites-le-nous en commentaires !
*Le prénom a été modifiée à la demande de l'intéressée
Le slow-travel c’est quoi ?
Par définition, le slow travel se traduit comme “le voyage lent”. Il s’agit de voyager autrement, en prenant son temps et en (re)découvrant le monde qui nous entoure lors d’un voyage qui dure longtemps (et non pour un trajet professionnel). Le concept repose aussi sur l’idée que ce voyage est censé rester durable pour l’environnement.
D’après une étude menée par Allianz Partners, 35% des familles sondées sont prêtes à faire plus attention à l’impact environnemental à l’avenir dans le cadre de leurs voyages.3Idem pour la fréquence de leurs voyages : 29% déclarent vouloir réduire leur empreinte carbone en optant pour des vacances durables comme le train ou les voyages en caravanes ou campings-cars.
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