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Les frontières planétaires : une boussole pour l’Humanité !

Blandine Janin-Reynaudloading
Blandine Janin-Reynaud
Publié le
Les gestes verts
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Les enjeux environnementaux sont vastes, complexes et, au premier abord, difficilement accessibles aux non scientifiques. C’est pourquoi les politiques ou les médias ont tendance, pour simplifier les problèmes, à les aborder en silos, sans les relier les uns aux autres : d’un côté le climat, de l’autre côté, la biodiversité ; d’un côté, la pollution des eaux, de l’autre, la déforestation. Pourtant, toutes ces notions sont liées et interdépendantes. La transition écologique sera systémique… ou ne sera pas ! Face à cette complexité, le concept de frontières planétaires est un formidable outil pédagogique qui permet de visualiser en un seul schéma où en est l’humanité vis-à-vis de mère Nature. Et le moins que l’on puisse dire, c'est qu’elle dépasse les limites ! 
Le Kaba vous présente dans cet article le passionnant concept de frontières planétaires.

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©markus-spiske-unsplash

Voyage au-delà des frontières planétaires   

Le concept de frontières planétaires (« planetary boudaries ») est issu des recherches du Stockholm Résilience Center, réunissant des scientifiques internationaux, conduites par le chercheur suédois Johan Rockström. Leurs travaux, publiés en 2009, ont mis en évidence 9 processus terrestres, dits limites ou frontières planétaires, dont nous dépendons pour garder une planète habitable (voir schéma). Chaque frontière dépassée augmente le risque de déstabiliser l’environnement planétaire de manière irréversible, avec des impacts majeurs pour les êtres vivants et, bien sûr, pour l’humanité.

Triste constat, aujourd’hui six limites planétaires sont déjà dépassées :

  • La biodiversité : le rythme de disparition des espèces vivantes sur notre planète est 10 à 100 fois plus rapide que la moyenne observée sur les 10 derniers millions d’années. Un véritable effondrement !
  • Le changement d’usage des sols : le sol est évidemment vital pour toutes les espèces. Pas d’humus, pas de nourriture ! Or, 38 % des forêts mondiales qui jouent un rôle vital dans le cycle de l’eau et la régulation du climat, ont été déforestées.
  • Les flux d’azote et de phosphore : les flux d’azote et de phosphore issus des engrais agricoles sont au moins deux fois supérieurs au seuil de zone sûre. Ils terminent dans les rivières et les océans et asphyxient les milieux aquatiques.
  • Les nouvelles pollutions chimiques : l’être humain, cet hyperactif, a créé 350 000 nouvelles entités chimiques, par exemple les PFAS ou bien sûr ce bon vieux plastique ! Les relargages massifs de ces pollutions font peser des risques grandissants sur la planète et l’humanité.
  • Le réchauffement climatique le climat s’est réchauffé de 1,1 °C par rapport à la période préindustrielle entraînant l’humanité vers des risques grandissants.
  • La perturbation de l’eau douce : ce qu’on appelle le cycle de « l’eau verte » (humidité des sols, évaporation, précipitations) est perturbé. « L’eau bleue » (rivières, nappes phréatiques) est également en passe d'être une limite dépassée.

Passons à présent à deux frontières dont la limite n’est pas encore dépassée !

  • L’acidification des océans : en raison de la trop grande quantité de CO2 émis par les activités humaines, l’océan s’acidifie, les planctons et les coraux peinent à se développer ce qui met en péril toute la chaîne alimentaire. Si nous dépassons les + 2 °C d’augmentation des températures, 99 % des coraux d’eau chaude disparaîtront.
  • L’appauvrissement de la couche d’ozone : enfin une bonne nouvelle ! La couche d’ozone nous protège des rayons ultra-violets. Cette frontière est revenue dans sa zone sûre grâce à l’interdiction de certains gaz utilisés dans les réfrigérateurs notamment. La preuve que l’humanité en coopérant est capable d’aboutir à des résultats positifs !

Enfin, la charge atmosphérique en aérosols : elle constitue une frontière un peu particulière, on parle ici des particules fines nocives pour la santé, issues par exemple des moteurs diesel. Au niveau mondial, la quantification de cette frontière n’est pas encore scientifiquement établie.

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Tout est lié

En passant en revue ces différentes frontières planétaires, on réalise à quel point elles sont poreuses et se nourrissent entre elles : les pollutions et le changement climatique nuisent au cycle de l’eau et à la biodiversité. Réciproquement, la déforestation aggrave le changement climatique, ce qui modifie toujours plus les écosystèmes et les conditions d’habitabilité. Toutes les formes de vie sur la planète s’en trouvent affectées : bactéries, champignons, plantes et arbres, poissons, insectes, oiseaux, mammifères…

En bout de chaîne, les sociétés humaines risquent de s’en trouver totalement déstabilisées : la baisse des rendements agricoles et l’effondrement de la biodiversité marine augmentent les famines, les mouvements migratoires et les inégalités, ce qui provoque en retour des conflits armés. La santé et la vie humaine sont aussi directement touchées par les pollutions, les phénomènes climatiques extrêmes (canicules, cyclones, inondations, submersions…). 
En Europe, 70 000 décès ont été causés par la chaleur pendant l’été 2022. Selon la revue médicale Lancet, si la planète devait se réchauffer de 2 °C au-dessus de la moyenne préindustrielle, le nombre de décès annuels dus à la chaleur serait multiplié par cinq1. Enfin, le déplacement d’animaux dû à la destruction de leur habitat et au changement climatique augmente les risques de pandémie. Celle de Covid19 semble n’être qu’une répétition générale de ce qui attendrait alors l’humanité.

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©margot-richard-unsplash

L’agriculture et l’industrie dépassent les limites

Aux sources de ces importantes perturbations, on retrouve les activités humaines et plus précisément les énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole) qui réchauffent le climat. Rappelons qu’elles représentent toujours 80 % des sources d’énergie dans le monde ! Nous les utilisons pour nous chauffer, nous déplacer mais aussi très largement pour fabriquer des biens de consommation plus ou moins indispensables !

Par ailleurs, le secteur agricoleet plus particulièrement l’élevage - est celui qui impacte le plus les frontières planétaires : la déforestation découle majoritairement de l’agriculture, pour cultiver de la nourriture destinée au bétail. Cette déforestation est la principale cause de destruction de la biodiversité, devant le changement climatique et les pollutions. Ces cultures requièrent également beaucoup d’eau. L’agriculture est l’activité humaine qui prélève les quantités d’eau douce les plus importantes. Les engrais utilisés en agriculture conventionnelle sont également très nocifs : les engrais azotés réchauffent le climat, tandis que les engrais phosphatés asphyxient les écosystèmes aquatiques. Ils sont par exemple à l’origine du phénomène des algues vertes en Bretagne.

Enfin, l’exploitation directe des milieux due à l’agriculture et à la pêche sont la deuxième cause de l’effondrement de la biodiversité.

Certes, il y a de quoi être déprimé par ce sombre tableau. Néanmoins, si les activités humaines sont entièrement responsables du désastre, tout n’est pas encore perdu et il ne tient qu’à nous d’éviter le pire. Réduire l’utilisation des énergies fossiles et végétaliser son alimentation sont deux leviers très puissants, à la portée de chacun de nous, mais nécessitant également un changement sociétal pour accélérer le changement. Il est donc essentiel non seulement de modifier son comportement mais aussi de militer pour passer à l’échelle supérieure.

Besoin d’aide pour accompagner votre transition ? Retrouvez tous les conseils sur www.lekaba.fr pour diminuer votre impact sur les frontières planétaires.

Pour aller plus loin : La Fresque des frontières planétaires et la Théorie du donut

Pour creuser un sujet un peu difficile, rien de tel que l’intelligence collective ! Calquée sur le modèle de la Fresque du climat, la Fresque des frontières planétaires est un atelier ludique et collaboratif de 3 heures créé par Arthur de Lassus, ingénieur centralien reconverti en maraîchage biologique Son objectif est de rendre accessibles à tous les différents enjeux environnementaux et surtout, de mettre les participants dans une dynamique collective d’action ! Pour participer à une Fresque des frontières planétaires, il suffit de consulter le site de l’association 1er degré et de choisir le lieu, la date et l’heure qui vous conviennent. Sachez que l’atelier peut également être suivi en ligne. 

Quant à la Théorie du donut, il s’agit d’une création de l’économiste britannique Kate Raworth fondée sur les frontières planétaires. Le donut (beignet circulaire avec un creux à l’intérieur) dessine un espace sûr et juste pour l’humanité : à l’extérieur, les limites naturelles, ou frontières planétaires, à ne pas dépasser (« le plafond ») ; à l’intérieur, les besoins essentiels, les droits humains et la justice sociale composent « le plancher » du beignet. La Théorie du donut revisite ainsi les principes économiques en mettant le facteur humain et la préoccupation environnementale au cœur de la réflexion.

Pour en savoir plus : La Théorie du donut, l’économie de demain en 7 principes de Kate Raworth, Éditions J’ai lu. 

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